vendredi 25 juin 2010

LAURENT GAUDE - La porte des enfers (2008) par Foxy Lady

Un roman à fleur de peau… à fleur de mots…





Naples 1980 : Matteo est en retard. Il presse le pas pour emmener son fils Pippo à l’école. Une fusillade éclate, et là, au milieu d’une foule hébétée, Matteo voit son fils de 6 ans mourir dans ses bras. Naples 2002 : Filippo termine sa journée dans le bar de son père adoptif Garibaldo. Il prépare un café pour un homme qu’il s’apprête à tuer : Toto Cullaccio. Mais avant de laisser cet être de malheur pour mort, il veut qu’il sache qui il est. Au pied de sa propre tombe, il révèle à Toto son identité. Il est Filippo de Nittis, « Pippo », mort en 1980, et revenu des Enfers grâce au sacrifice de son père Matteo. Ce roman est d’une intensité et d’une beauté rare. Il nous touche au plus profond de nous même, nous ébranle et nous égratigne le cœur. Comment faire le deuil d’un être qui représente notre raison et notre joie de vivre ? Comment accepter et affronter l’inacceptable ? A travers la souffrance de Matteo et Giuliana après la perte de leur enfant, c’est surtout la déchirante solitude ou chacun s’enfonce qui nous prend aux tripes.



Matteo quitte chaque soir le domicile conjugal pour arpenter les rues de Naples dans son taxi, incapable d’accomplir la promesse faite à sa femme : lui ramener la tête de l’assassin de leur fils. Giuliana, atteinte dans ses entrailles de mère blessée, finira par sombrer dans la folie, après avoir quitté son mari.Je pourrais dévoiler les moindres recoins de ce roman hors du commun, mais je pense que chaque page mérite d’être déflorée pleinement pour mieux s’emparer du texte et s’en imprégner. « La porte des enfers » est le récit d’un deuil et d’une vengeance, mais c’est aussi le récit de la réalité de chacun d’entre nous face à la mort et à notre capacité à survivre aux êtres qui nous ont quitté et dont l’absence nous est intolérable. Laurent Gaudé est allé jusqu’à faire descendre son personnage aux Enfers, tel un Orphée moderne, pour arracher son enfant à la mort et le ramener à la vie. Les personnages secondaires qui accompagne Matteo dans sa quête sont très attachants et intéressants, tout particulièrement Grace, le travesti prostitué.
L’écriture est fluide, épurée, dense et instinctive, et nous emmène loin dans les méandres de l’âme humaine. On est d’emblée happé par les 2 récits qui se chevauchent sous nos yeux, on es saisi par la puissance et l’intensité de chaque mot qui pénètre notre cœur, et ce n’est que lorsque le roman est achevé, qu’on se force à retrouver notre souffle, jusque là coupé. Certains auteurs ont le pouvoir de suspendre le temps et l’espace, et de nous embarquer dans l’univers qu’ils ont créé. C’est sans nul doute le cas de Gaudé et de ce roman, à la fois fascinant, sombre et bouleversant.On est pas tout à fait le même après une telle lecture…

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