mardi 9 novembre 2010

RED BEANS & PEPPER SAUCE - "Le Gardien" (2010) par Rockin-jl et Luc B.



Red Beans & Pepper Sauce, le nom m’évoquait en vrac les Red Hot Chili Peppers, et le Texas, celui de ZZ TOP, un blues rock funky plutôt brut, et bien en fait la musique de ces Red Beans est beaucoup plus fine qu’une poignée de fayots au piment.
A la première écoute, j’ai été étonné par la qualité des musiciens et des compos de cet album. Le jeune groupe de Béziers signe là une des meilleures productions hexagonales de l'année. Mais c’est bien beau de le dire, encore faut il argumenter un peu, alors écoutons ensemble.

Et commençons par les 8 minutes de "Le Gardien", riff Zeppelinien d’entrée puis on se calme, changement d’atmosphère, claviers (Kristo), et arrivée de la chanteuse, Houria, très agréable, avec un petit coté jazzy, qui ne cherche pas à forcer sa voix pour faire comme Janis ou Robert Plant, puis gros solo de guitare qui va crescendo, re gros riff...
Pas évident de faire côtoyer autant de climats dans un titre, y’a clairement des influences du Led Zep (période folk rock), mais aussi des Pink Floyd dans les moments plus calme ; franchement cette pièce serait l’œuvre d’ un "gros nom", je connais pas mal de mags qui s'exalteraient.
Second titre, Honey Hush, seule reprise, de Lowell Fulson, dans une version chaloupée moins rentre dedans que celle bien connue d’Albert Collins, claviers, solos, trombone (José Moléro), une relecture originale et pas à la manière de, comme trop souvent avec les reprises.
On termine cette prometteuse entrée en matière par Go away, ça part à la Stevie Ray, pour continuer en blues chaloupé entre Chicago et jazz, claviers et surtout un harmonica discret (Christian Surville) mais qui s’insinue irrésistiblement : mon titre préféré.
Sans rentrer dans les détails de la suite de l’album, Welcome To The party et Your My Hyde sont des titres chargés de funky, z'ont dû écouter Funkadelic ceux là , grosse basse (Denis Bourdié) ; Don’t Cry et Sugar des ballades bluesy, No Right To Touch lorgne vers Steely Dan, avec un excellent solo de guitare; Outlaw on the run, ramène vers un hard bluesy, qui me fait un peu penser à l’excellent Half Way Home si quelqu’un se rappelle de ce combo mené par la chanteuse Jennifer Barry dans les 90’s. Tout ça avec la guitare omniprésente de Laurent, vrai guitar-hérault (fallait la faire celle-là!), qui nous balance un paquet de sacrés solos mais pour autant, comme je le disais au début, nous n'avons pas affaire là à du pur blues rock à guitares mais à un groupe qui a cherché à créer un son propre en mixant ses diverses influences, avec réussite.


Pardon, je n’ai pas cité le batteur, Thierry Imperato ni Jersey Julie, sax sur Welcome to the party et chant sur Sugar, qui clôt le disque.

Mais je laisse la parole à mon confrère, l’éminent Luc B, qui a je crois aussi beaucoup goûté ce disque.

Rockin-jl

Merci cher collègue...

Vous connaissez la version de "No quarter" sur le live de Led Zep au Madison Square Garden ? Cette intro aérienne aux claviers, ce long crescendo jazzy de Page à la guitare ? C'est ce qu'évoque le premier morceau de cet album, "Le gardien". C'est dire si ce disque commence sous les meilleurs auspices (and love...). Un titre énorme. Et lorsque déboule "Honey Hush" et son groove soul, légèrement funky, cette voix si sensuelle, on se dit qu'on tient-là un album qu'on n'est pas peu fier de posséder. D'autant que "Honey Hush" se clôt sur un chorus de trombone (José Moléro), et là c'est l'extase ! J'adore le trombone, c'est rare d'en croiser un, on privilégie le sax généralement. "Go away" donne dans le blues swinguant, moelleux, une merveille, et sur "Welcome to the party" Thierry Imperato, impérial, sort le grand jeu aux baguettes (écoutez sur les couplets, le jeu à la caisse claire, discret, mais présent comme il faut). Grosse intro sur "Outlaw on the run" dont le riff de guitare aurait plu à un Richie Blackmore, excellent morceau, pêchu, qui s'emballe sacrément comme il faut.


Bon alors, y'a rien d'autre à dire que du bien ? Ben... j'vois pas... Ah si, je trouve parfois ("Honey Hush" ou "No right to touch") que les intros sont un peu longues, qu'on en vient pas directement à l'essentiel. Il y a une intro, puis un riff d'ouverture. Sur scène, je ne dis pas, mais en studio... Et puis on aurait aimé parfois plus d'agressivité dans le chant. Le registre de chant est souvent le même sur des morceaux aux tonalités pourtant différentes. Il ne s'agit de hurler pour hurler, mais de davantage de présence vocale, que la chanteuse ne soit pas vampirisée par les quatre musiciens. Houria a une très jolie intonation sur "Your my hyde", fin de premier couplet, écoutez la phrase "I known you guess my name" : Janis Joplin ! Encore une fois, ça va vite, mais ça m'a vraiment sauté aux oreilles. Houria, de temps à autres, sortez les tripes ! Tina Turner, Aretha Franklin, Ella Fitzgerald, Big Mama... il fallait qu'elles s'imposent face à des sections de cuivres rugissants, qu'elles trouvent leur place ! La voix est le cinquième instrument du groupe. Rockin' disait (à juste titre) que la chanteuse ne cherche pas à imiter Joplin, ou Plant. A mon sens, Plant n'était pas un chanteur puissant (comme Otis Redding, Tom Jones, ou les "shouters" de blues), mais il a su trouver un espace, un style, un phrasé, pour se distinguer, et rivaliser avec la puissance de feu des trois autres.

LE GARDIEN est vraiment un album enthousiasmant. Une musique qui puise dans différents registres, mais qui garde une vraie cohérence d'ensemble. D'excellents musiciens, des compositions assez sophistiquées mais pas prétentieuses, et surtout, une musique généreuse. Une musique qui donne à écouter, qui offre du plaisir, qu'une seule écoute ne permet pas de cerner, sur laquelle on revient, et qui prend le temps d'installer des climats (les morceaux font facilement 6 ou 7 minutes). Une musique qui fait entendre de vrais instruments (variétés de claviers), et qui ramène à la période 60's/70's, période de fusion, sur une base bluezy, sans pour autant jouer la carte "roots" à tout prix.

Bravo, et merci à vous les Red Beans (c'est quand vous voulez dans le Val de Marne...).

Luc B.





pour acheter le cd :http://www.cropsbluesshop.kingeshop.com/RED-BEANS---Le-gardien-cbbaeafoa.asp
ou sur le myspace : http://www.myspace.com/redbeansandpeppersauce / contact: red.beans@hotmail.fr

Mais laissons Laurent, guitariste et compositeur, nous parler un peu de son groupe et de sa musique...


Le Deblocnot': Red Beans & Pepper Sauce... pourquoi ce nom ? hommage aux Red Hot ? au cassoulet ? à Mister Bean ?

Laurent : En fait c’est un parallèle entre la cuisine cajun et la musique qu’on fait. La culture cajun est le produit d’un mélange multi culturel assez improbable et cette cuisine mélange parfois un peu tout et n’importe quoi. Les haricots rouges sont présents dans quasi toutes les recettes, ils ne sont pas l’aliment principal mais servent de liant, de base. Un peu comme le blues dans notre musique en fait : il n’est pas le style principal, mais il est à la base de tous les styles qu’on mélange du funk au rock. On n’est pas un groupe de blues traditionnel c’est sur, mais le blues est toujours présent là quelque part. Quand à « pepper sauce » je me rappelle plus...

Peux-tu nous parler de ton parcours musical, et de celui des autres membres du groupe ?

J’ai commencé à jouer sur scène avec des groupes de reprise branché rock 70’s mais en amateur puis j’ai suivi une formation musicale dans une école (IMFP) à Salon De Provence pendant 3 ans. Et quand je suis revenu sur Béziers j’ai commencé à jouer avec les musiciens blues du coin qui ont achevé la formation du jeune padawan que j’étais. C’est comme ça que j’ai d’abord rencontré Thierry le batteur. C’est un des batteurs les plus appréciés des scènes blues vers chez moi. Il savait que je composais tout seul dans mon coin et c’est lui qui m’a poussé à monter ce projet. C’est aussi en jouant sur scène que j’ai rencontré Denis (basse) et Christo (clavier). Et quand il a fallu choisir des zicos pour ce groupe j’ai tout de suite pensé à eux parce que je les connaissais et leur jeu correspondait tout à fait à ce que je recherchais. Ils ont accepté de me suivre et j’en suis le plus heureux. J’adore leur son vintage, que ce soit Denis avec ces filets plats et sa vieille tête d’ampli Acoustic ou Christo et ses vieux sons de Rhodes ou de Wurlitzer. Houria c’est la petite jeune du groupe, on a tous passé les 35 ans mais elle n'en pas encore 25. Un pote l’a croisée un soir de jam et m’a filé son contact et je dois dire qu’il a bien fait car elle nous apporte beaucoup d’énergie et de fraicheur.

Quand tu nous as parlé de votre album, tu nous as parlé de « Blues Fusion »… c’est quoi du blues fusion pour toi ?

En fait je ne sais pas quoi dire quand on me demande le style du groupe. Le blues fusion ça pourrait être une sorte de blues rock dans lequel il y aurait du funk et une paire d’autres trucs. Aujourd’hui toutes les musiques sont métissées, c’est difficile de mettre une étiquette.

Question qui rejoint un peu la précédente : Quelles sont vos influences ? Si on te dit Led Zep, Free, Pink Floyd , les Red Hot , le blues rock à la Stevie Ray , des choses plus funky comme Dan Reed Network ou Stevie Salas, sans oublier le jazz , on a bon ?

Ouaip sauf pour Dan Reed Network et Steve Salas que je ne connais pas (je vais me rattraper). Mon groupe préféré reste Led Zep parce que j’ai une admiration sans borne pour chacun de ces membres. Mais l’artiste qui m’a le plus influencé est Jimi Hendrix. C’est lui qui a commencé à mélanger les genres, le rock, la pop, le blues, la soul, etc. Pour la soul c’est la Stax, la Motown. The Meters, Wild Magnolia et tout ce qui vient de la Blaxploitation. Thierry (batterie) lui est vraiment blues rock, il aime Robben Ford, Albert Collins et bien sûr plein de trucs de batteur avec des mesures asymétriques et tout le bordel... Christo et Denis ont des influences très diverses de Santana à Pink Floyd en passant par Brian Setzer. Houria elle est très branché soul music, la Motown et la Stax jusqu'à Mickael Jackson et Prince. Le Jazz est présent chez nous à travers les jam-band comme les Allman Brother ou le Derek Trucks Band voire le Jimi Hendrix Experience dans le sens où on aime bien les longs solos et les longues impros sur scène. C’est pour cette diversité que j’ai choisi ces zicos car si je compose la totalité des titres je leur laisse en revanche carte blanche pour écrire ou improviser leurs parties pour profiter au mieux de leur personnalité musicale.

Parlons un peu blues puisque c’est quand même la base de votre musique, avez-vous connu le blues via le rock 70 (Cream, Led Zep, Mayall..) ou à la source, Muddy waters, BB King et consorts ?


Par les Anglais ou certains ricain des 60’s. Mes parents ont une belle brochette de 33tours parmi lesquels j’ai trouvé le 45t de « Hey Joe », « Led Zep II », le « White Album » des Beatles, le 45t de « Satisfaction », les premiers Chicago, Blood Sweat and Tears et plein de disque d’Otis Redding dont mon père, chanteur dans un groupe en 68, était absolument fan. Mais pas de blues pur ou alors les maîtres comme les 3 King : Freddy, BB, Albert ; les Albert Collins ou John Lee, j’y suis venu plus tard avec des potes qui avaient plein de skeuds ou de vidéos.

Et aujourd’hui vous écoutez quoi ?

Dereck Trucks band, John Mayer Trio, Gov’t mule sont des groupe qui m’influencent beaucoup dans mes compositions. Il y a aussi The Budos Band, Elie Paperboy Reed, Joe Bonamassa. Thierry qui est très branché “new-orleans” m’a fait découvrir Stanton Moore un batteur gavé de groove qui est un spécialiste des rythmes funky de la New Orleans. Et perso j’attends avec impatience le dvd du Crossroads 2010.

Votre reprise de "Honey Hush" est très réussie et d’une coloration vraiment originale, pourquoi cette reprise ? Hommage à Albert Collins ?

Merci. En fait on avait ce morceau et je n’avais pas encore écrit de texte. Donc j’ai voulu faire ce qu’avait fait Hendrix avec Lover man. Comme il a écrit le texte bien après avoir écrit la zique il s’est contenté pendant quelques concerts de chanter quelques phrases de Rock me Babe comme au Monterey pop festival de 67. Donc on a choisi Honey Hush car on aime beaucoup The Iceman le temps que j’écrive un truc et puis c’est resté. Mais ça tombe à plat car je me suis aperçu trop tard que le morceau n’était pas de lui mais de Lowell Fulson, lol. Mais bon c'est sa version que j'aime.

Quels sont tes guitaristes favoris ?


Hendrix, Page, Clapton, Derek Trucks, SRV, Albert Collins et la liste pourrait être encore très longue !! Hendrix reste mon préféré, je joue d’ailleurs dans un tribute band qui lui est dédié et qui s’appelle " Voodoo Chile ". (http://www.myspace.com/voodoochilemusic)

Et votre chanteuse, ses modèles ou chanteurs (euses) ses préférés ?


Prince, Mickael Jackson, Tina Turner et je lui fais découvrir le rock avec Hendrix et Led Zep qu’elle aime beaucoup.

Cela peut il vous aider d’être chroniqué dans un blog amateur comme le notre ? Plus généralement, comment un jeune groupe comme le votre peut il se faire connaître ? promo, scènes ?

Le Net est à la fois une bénédiction et une catastrophe. Tout le monde est visible mais du coup il y a embouteillage. Une vie ne suffirait pas pour découvrir tous les zicos intéressants sur la toile. Il nous faut donc essayer de toucher un public en phase avec notre musique et qui reste à notre portée. Par exemple je suis super content d’avoir plein de connexions de la part d’américains sur le Myspace du groupe, mais ce ne sont pas eux qui vont venir nous voir sur scène ou nous programmer. Or le but est là : la scène. Et pour cela il faut être vu ou entendu par les diffuseurs qui en reçoivent 40 par jours des comme nous. Donc plus on est visible mieux c’est. Votre blog nous aide à avoir de la visibilité et je vous en remercie grandement. En plus vos chroniques sont organisées par style de musique et je trouve cela très intéressant car ça permet de faire un premier tri pour le lecteur dans un océan de données qu'est le Net.

Merci, en tous les cas on vous souhaite bonne chance car votre album est d’une qualité étonnante et on a pris un grand plaisir à l’écouter. Quelque chose à ajouter ?

Oui : merci à vous.
Et surtout : coupez la télé et allez voir les groupes sur scène !!!

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