dimanche 7 avril 2013

DONALD BYRD ET WAYNE SHORTER "FREE FORM" (1961) par FreddieJazz




Avec FREE FORM, le trompettiste Donald Byrd signe un enregistrement très réussi. Dans un collectif fort passionnant, un peu dans la lignée de celui d’Horace Silver (le premier thème, "Pentecostal Feeling" est à ce titre significatif), la session, loin d'être une grande surprise, garde tout son intérêt. Elle s'inscrit dans un hard-bop de bon aloi, mais préfigure de par une thématique aléatoire et mystérieuse le jazz avant-gardiste des années suivantes (que l'on trouvera notamment dans les galettes de Jackie McLean, Grachan MoncurIII ou encore Bobby Hutcherson). 

Né en 1932 à Détroit, Byrd, comme vous le savez peut-être, vient de nous quitter ce mois-ci (le 4 février 2013). Depuis quelques années, on n'en entendait plus trop parler. Bien dommage. Il est vrai qu'il n'a jamais été aussi populaire qu'un Freddie Hubbard ou un Lee Morgan

Qu'importe ! FREE FORM témoigne à sa façon, en ce début des années 60 (la session a été enregistrée le 11 décembre 1961 dans le studio de Rudy Van Gelder) de la vivacité d'une nouvelle génération de musiciens (Herbie Hancock et Wayne Shorter ici présents n'allaient pas tarder à rejoindre le quintet de Miles Davis).

Cette session immortalise donc la rencontre de cinq astéroïdes dans le ciel new-yorkais et tient, il faut bien le dire, d'une belle alchimie grâce à un Wayne Shorter qui assume complètement son rôle de co-leadeur. Le saxophoniste était alors membre du super-power quintet (parfois sextet) d'Art Blakey, puis allait rejoindre Miles Davis, comme chacun sait. Le style de Byrd, avant qu'il ne se lance dans le jazz-funk (on écoutera avec beaucoup d'intérêt Street Lady enregistré au cours de la décennie suivante...) est ici ambitieux, très classique aussi (ou "mainstream"). On ne se focalisera donc pas sur le titre qui pourrait nous laisser croire que la session s'inscrit dans un free jazz déstructuré et pimenté. Loin de là. Comme je le disais plus haut, c'est du hard-bop bien achalandé, bien équilibré avec de belles mélodies et une thématique assez identifiable.

Aux côtés des deux soufflants et du pianiste, on trouve une section rythmique de rêve : Butch Warren à la contrebasse et Billy Higgins à la batterie. Depuis son arrivée sur le label d'Alfred Lyon, Byrd aura été de quasiment toutes les plus grandes entreprises (que l'on se souvienne de Fuego). On se souviendra aussi longtemps de son association avec le sax baryton Pepper Adams. Ici, il signe toutes les compositions hors mis "Night Flower" et "These Wishes" qui sont de la plume de Herbie Hancock. Les sonorités sont savamment agencées et possèdent un côté assez mystérieux. Elles n'alourdissent jamais la lisibilité mélodique, bien au contraire. Avec ses pulsations obliques, FREE FORM n'est peut-être pas le plus mémorable des albums Blue Note mais mérite cela dit un sérieux détour. Dans ce parcours enchanteur ("Nai Nai" et surtout "French Spice"), on ne notera pas de surprise notable, mais le bonheur d'y (re)découvrir un hard bop de bon aloi, aux antipodes de tous les clichés de l'époque, grâce à un alliage unique de timbres provenant des soufflants qui se révèlent époustouflants. Quant à Byrd et Hancock, les deux hommes s'étaient déjà retrouvés au cours de la session précédente, Royal Flush, enregistrée en 1961 elle-aussi.

Pentecostal Feelin' - 6:43  /  Night Flower - 6:48  /  Nai Nai - 6:37  /  French Spice" - 8:02  /  Free Form - 11:11  /  Three Wishes" – 5 :12


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