jeudi 30 janvier 2014

FRANQUIN : SPIROU, GASTON, LE MARSUPILAMI ET LES AUTRES par Pat Slade






L’école Belge



Peyo, Roba, Jacobs, Greg, Morris, Jijé, De Moor sans oublier Hergé, la liste des dessinateurs belges est longue… très longue. Franquin lui, reste un pilier de cette honorable institution. Tous comme Hergé avec Tintin, son personnage de Spirou, (Même si ce n’est pas lui qui créa le personnage, ni même qui le dessina en premier, mais Rob-Vel en 1938) reste une icône du dessin pour la jeunesse made in Belgium.

Nous sommes le 3 janvier 1924 dans la ville d’Etterbeek dans la banlieue de Bruxelles, 18 jours avant la mort de Lénine et 22 avant l’ouverture des jeux olympiques d’hiver à Chamonix. André Franquin, fils d’un employé de banque rigide, pointe le bout de son nez dans un monde en pleine évolution et où le bouleversement des années futures commençait déjà à remuer la planète (Hitler écrira « Mein Kampf » cette année là). Dès l’âge de 5 ans, il commence à avoir des prédispositions pour le dessin. Franquin a déjà des points communs avec Hergé, ils sont nés tous les deux à Etterbeek et ont fréquenté la même école (A quelques années d’écart). Comme tous les gamins, ils dévorent les journaux et les bandes dessinées de l’époque : Mickey, Terry et les pirates par Milton Caniff, les aventures de Tintin (Bien sûr !) ou encore le journal créé par Pierre Dac «L’os à Moelle». Le cinéma burlesque et ses classiques : Laurel et Hardy, Mack Sennett et Chaplin et les dessins animés : Disney et Avery influenceront son graphisme et son humour.


Après s’être ennuyé au cours de l’école Saint-luc, il devient apprenti animateur dans un petit atelier de dessin animé avec pour compagnon, Morris et Peyo. L’arrivé des américains à la libération avec leurs dessins animés sous le bras, feront en sorte que leur petite entreprise connaîtra la crise et mettra la clé sous la porte la concurrence étant trop rude.
En 1945, il est traîné par son copain Morris aux éditions Dupuis ou Jijé le prend sous son aile. En 1946, ce dernier lui propose de reprendre les personnages de Spirou et Fantasio. Pendant dix ans, il va se consacrer uniquement à ce duo et va même l’enrichir de nouveaux personnages comme le comte de Champignac, la journaliste Seccotine, Zantafio le cousin de Fantasio, sont négatif parfait. Zorglub, ancien camarade d’université de Champignac, mégalomane, nerveux à l’extrême, un savant fou mais pas si méchant que ça, il cherche toujours à ne jamais tuer  ni blesser personne, il n’est pas conscient du mal qu’il provoque, c’est un méchant sympathique. 
Et surtout le marsupilami, animal venant du pays fictif de Palombie. Ovipare, omnivore, cette animal à une queue de 8 mètres de long, un langage particulier (Houba houba hop !) Il est doté d’une force herculéenne, a un pelage jaune à taches noir. Il apparait dans les aventures de Spirou en 1952,il reviendra très souvent jusqu'à que Franquin abandonne Spirou à Jean-Claude Fournier et garde les droits sur l’étrange animal qu’il considère comme un de ses personnages les plus réussis.



Gaston, héros sans emploi



En 1955, le torchon brûle entre Franquin et Charles Dupuis (L’homme des éditions). Il rejoindra le journal de Tintin ou il créera les personnages de Modeste et Pompon, l’histoire d’un jeune homme avec son éternelle fiancée dans des histoires de voisinages bon enfant. On trouvera Greg (Achille Talon), Peyo (Les Schtroumphs) et même René Goscinny en tant que scénariste. La situation  s’éclaircit et dès 1957, il retourne chez Dupuis. Tous commence par des traces de pas bleus dans les marges des pages du journal, la semaine suivante, apparaît un personnage en costume bleu et nœud papillon. Un dialogue avec Spirou et cet étrange personnage est resté célèbre : « Qui êtes-vous ? - Gaston. - Qu'est-ce que vous faites ici ? - J'attends. - Vous attendez quoi ? - J'sais pas… J'attends... - Qui vous a envoyé ? - On m'a dit de venir... - Qui ? - Sais plus...- De venir pour faire quoi ? - Pour travailler... - Travailler comment ? - Sais pas… On m'a engagé...- Mais vous êtes bien sûr que c'est ici que vous devez venir ? - Beuh... ».
Quelques temps plus tard, il reviendra, habillé d’un jean noir, d’un pull-over vert et chaussé d’espadrilles orange qui avec le temps deviendront bleus. Il déambule pratiquement tous le temps la clope au bec. Gaston ? C’est l’anti-héros. Jeune, lymphatique, paresseux, gaffeur, il essaye par tous les moyens d’éviter de travailler, sauf pour inventer des machines diaboliques, choyer une mouette ronchon  et un chat dans les bureaux, provoquer explosions et catastrophes, des gaffes apocalyptiques (on va en reparler). Autour de lui viendront se greffer une pléiade de personnages, Fantasio qui laissera la suite à Prunelle, Lebrac le dessinateur de BD,  M. Boulier le comptable d’une autre époque, M. De Mesmaeker qui, à cause des catastrophes provoquées par notre «héros» n’arrivera jamais à signer ses fameux contrats, Mad’moiselle Jeanne, la fiancée officieuse, l’agent Longtarin qui, cherchant à verbaliser à tout prix la voiture de Gaston, pétera les plombs plus d’une fois et enfin ses potes : Bertrand Labévue et Jules-de-chez-Smith-en-face le double de Gaston dans l’entreprise avec qui il fait les 400 coups.



Gaston un inventeur de génie



Même si le personnage ne transpire pas le courage, il faut bien reconnaître que son imagination est fertile. Il inventera des objets tous aussi incroyables les uns que les autres, la chaise mobile, le monorail de bureau, le mastigaston et surtout le gaffophone, une harpe diabolique dont les vibrations font tomber les plâtres des murs et décoller le papier peint. Il créera aussi quelques recettes culinaires (A éviter) comme la morue aux fraises avec mayonnaise, chantilly aux câpres flambé au pastis, les huîtres au chocolat ou encore les crêpes montgolfière, bonne appétit si vous êtes à table ! Le temps de 16 albums, Gaston et son créateur vont s’assagir. Gaston deviendra un écolo-pacifiste-humaniste qui fustigera les pollueurs de tout poil et mènera un combat pour la cause animale. Il a su s’entourer dans ses aventures de bestioles plus ou moins farfelues comme le chat dingue, la mouette rieuse, le poisson rouge «Bubulle» et sa souris «Cheese». Pour finir avec Gaston, n’oublions pas sa voiture jaune avec ses bandes latérales à carreau noir et blanc à laquelle il apportera maintes modifications. C'est une Fiat 509, modèle construit entre 1925 et 1929 et non une Ford T comme certain pourrait le croire, il y créera même le premier airbag de l’histoire de l’automobile.


Franquin et ses idées noires



En 1977 ; il crée ses premières idées noires dans le Trombone Illustré, un éphémère supplément au journal Spirou et continuera dans Fluide Glacial. Rien que le titre veut tous dire, des dessins sombres, ou le noir domine sur le blanc, un regard acide de la société dans laquelle nous vivons. De l’humour il y en a toujours, mais il est plus noir !!
En 1989, il tournera une série enfantine qui sera l’objet d’une diffusion télévisé en 78 épisodes «Les tifous». Ayant cédé les droits de ses personnages dont Gaston, il continue tous de même à travailler. Pourtant en 1996 sort l’album n°15 de Gaston que les fans attendaient depuis longtemps, succès immédiat avec 650.000 albums vendus en moins de six semaines.
Le 5 janvier 1997 un infarctus sera sa première gaffe et sa dernière idée noire. Hergé se considérait comme un piètre dessinateur face à ce grand artiste qui a imprimé son empreinte sur le journal Spirou. Son style est devenu plus nerveux avec la maturité et a apporté vie, humour et dynamisme.


1 commentaire:

  1. Franquin ? Un géant de la BD. Un maître, un génie, du talent à l'état pur.
    Et il faut voir ses croquis et esquisses (généralement au crayon ou au fusain) pour constater qu'il était capable de réaliser des dessins d'une grande précision, d'un trait frôlant la réalité. A ce titre, ses essais sur des chats sont fabuleux.

    (toujours cru que c'était une Ford, moi. M'enfin)

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