jeudi 15 mai 2014

LE PLUS PETIT BAISER JAMAIS RECENSÉ de Mathias Malzieu - par Foxy LADY




Voilà un roman d'une poésie saisissante, le plus joli livre qu'il m'ait été donné de lire depuis longtemps... Si je devais donner le prix du coup de coeur du mois, je le décernerais volontiers au dernier roman de Mathias Malzieu « Le plus petit baiser jamais recensé ».

L'histoire, en quelques mots : Un inventeur dépressif qui a subi une grosse peine de coeur rencontre une jeune fille, Sobralia, qui, quand on l'embrasse, disparaît.

« Le plus petit baiser jamais recensé. Un millième de seconde, pulpe et duvet compris. A peine une effleure, un origami »...

Dès lors, il n'aura de cesse de vouloir retrouver celle qui « fait pousser des roses dans le trou d'obus qui lui sert de coeur ».

Avec l'aide de sa pharmacienne Louisa, de Gaspard Neige, un détective à la retraite et de son perroquet Elvis (qui a des dons très particuliers...), il se lance à la recherche de cette femme invisible, tout en faisant pousser « des fleurs d'harmonica sur le plancher ».
Il recrée avec l'aide de chocolats inventés la sensation de ses baisers et prépare des messages d'amour pour le jour où Elvis retrouverait cette « réincarnation de Betty Boop » asthmatique, qui siffle en ré-mineur...

Au fond, « Le plus petit baiser jamais recensé » nous parle tout simplement de la rencontre de deux coeurs brisés qui doivent faire le deuil de leur passé pour se reconstruire et vivre une nouvelle histoire sans peur de souffrir ou de se faire souffrir.

« Cétait à la fois effrayant et rassurant de se confronter à quelqu'un d'aussi extraordinairement abîmé par l'amour. Un monstre de mélancolie qui se fait peur au point d'accepter sa condition de fille invisible... Ses souffrances résonnaient avec les miennes et je me blottissais dans cet écho. Comme elle, je présentais un terrain miné par l'explosion amoureuse. »

Que vous dire si ce n'est que c'est beau, fantaisiste, onirique et tellement bourré de poésie qu'on en aurait presque le vertige...

Voici quelques petites citations prises au hasard, pour le plaisir :
« Mon cerveau est une maison de campagne pour démons. Ils y viennent souvent et de plus en plus nombreux. Ils se font des apéros à la liqueur de mes angoisses. »

« Je suis devenu un putain de sapin de Noël de janvier toute l'année, du genre qu'on abandonne sur les trottoirs après l'avoir dépouillé de tout ce qu'on lui avait donné. J'avais quitté ma forêt sauvage pour devenir un arbre domestique. J'avais appris à devenir heureux en appartement avec mes guirlandes électriques pleine de faux contacts. »
« Trainant malgré moi ma carcasse sur les trottoirs désallumés de janvier, j'ai cru m'enrhumer pour toujours. Les gens dans la rue se moquaient de moi et de mes guirlandes sans électricité. Je faisais peur avec mes habits de l'hiver dernier et leur odeur de lessive d'un ancien bonheur ».

Pour ceux qui l'ignoreraient, Mathias Malzieu, né en 1974 à Montpellier, est le leader du groupe rock Dyonisos, pour lequel il écrit, compose et interprète les chansons. Amateur de sensations fortes et de sports extrêmes, ce sont ses impressionnantes prestations live qui l'ont propulsé sur le devant de la scène. Il est l'auteur des livres « 38 mini westerns (avec des fantômes)» (2003), « Maintenant qu'il fait tout le temps nuit sur toi » (2005), « La mécanique du coeur » (2007) (adapté récemment au ciné) et « Métamorphose en bord de ciel » (2011).
Il me semble juste impossible de ne pas avoir un coup de coeur pour ce petit livre plein de pudeur, pour lequel je dirais que la valeur n'attend pas le nombre des pages.

C'est romantique sans être niais, c'est triste sans toucher au tragique, c'est tendre comme une caresse et gourmand comme un bonbon qui, quand on le croquerait, nous ferait une explosion de bulles de champagne au coin des lèvres.

J'ai adoré l'inventivité qui déborde à chaque ligne, le nom des rues Parisiennes revisitées en Place de la Pastille, Rue Charlie Chaplin, Passage du Rockabilly, Boulevard Bashung ou Boulevard Lee Hazlewood ainsi que les jeux de mots de l'auteur, comme le « tremblement de tête » au lieu d'un tremblement de terre, « stopper l'amouragie » pour l'hémorragie ou « les floconfettis avaient recouvert le quartier » pour parler de la neige qui tombe du ciel.
Certains passages sont savoureux, comme celui où le héros se retrouve à faire le bilan de son ancienne relation avec son ex petite amie à la « Gendarmerie des sentiments ».

Je ne peux que recommander ce conte décalé et savoureux...

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