vendredi 26 février 2016

ZOOTOPIE de Byron Howard et Rich Moore (2016) par Luc B.


ZOOTOPIE marque le retour de Disney vers le film animalier. Exit les princes plus ou moins charmants, les robots rigolos ou les super-héros en guimauve, et welcome les poules, mulots, renards, belettes, ours, rhinocéros, zèbres ou lions. Qui vivent tous ensemble, en bonne intelligence, dans la ville de Zootopie. C’est là que débarque la jeune Judy Hopps, une lapine, fraîchement promue inspectrice de police, et avide d’en découdre avec le crime. Victime de préjugés, thème sous-jacent du film, elle sera expédiée à la circulation par le capitaine de police, Bogo, un buffle un peu mufle, qui préfère mettre ses meilleurs hommes (des éléphants) sur les affaires les plus périlleuses. Comme celle qui inquiète en ce moment le maire Leodore Lionhart (un lion) et son adjointe mademoiselle Bellwether (une brebis) : des cas de disparitions mystérieuses, chez des prédateurs.

Profitant de la visite au poste de police de madame Otterton, une loutre dont le mari vient justement d’être kidnappé, Hoops la joue au culot et se propose pour mener personnellement l’enquête. Mademoiselle Bellwether appuie cette idée (solidarité féminine, ou calcul politique ?), et le chef Bogo n'a plus qu'à obtempérer 

Judy Hoops va alpaguer un petit escroc, Nick, un renard qui trafique du sorbet à la framboise. Nick connait pas mal de monde en ville, il a pu voir ou entendre quelques choses, mais n’a pas trop envie de collaborer avec la police. Hoops le menace de refiler son dossier au Fisc…
Je pense que c’est un des scénarios les plus aboutis depuis que Disney s’est mis au cinéma ! D’abord il y a cette (bonne) idée de faire de ce film un polar. Avec tout ce qui va avec, investigation, action, trahison, corruption… Le couple Judy / Nick rappelle tous les duos du genre, depuis 48 HEURES ou L'ARME FATALE. Ensuite, faire vivre ensemble des espèces différentes, qui devraient logiquement se bouffer entre elles, mais qui cohabitent en bonne intelligence. Chacun son quartier, ses transports (bah oui, une souris et une girafe ne passent pas sous les mêmes portes...). 

Ces animaux conduisent des voitures, prennent le métro, vivent en appartement, y’a les banquiers, les ouvriers, les flics et les mafieux, chaque classe est représentée, les proies et les prédateurs partagent le même espace, sans crainte. Bien que Hoops porte une bombe anti-renard à la ceinture… Ce qui va fortement contrarier Nick, plus tard, déçu qu’on puisse encore, aujourd’hui, avoir de tels préjugés…
Judy Hoops et Nick vont faire équipe sur l’affaire des disparitions, et commencer à visionner les bandes des caméras de surveillance municipales. 

L’affaire s’avèrera plus crapuleuse que prévue. Est-ce l’œuvre de petits malfrats, d’un savant-fou en manque de cobaye, ou d’un plan beaucoup plus machiavélique pour semer le trouble, le chaos, la peur, la panique dans la population, qui permettrait aux autorités de légitimer l’usage de la force, et museler l’opposition ?

Évidemment, le film est truffé de gags, jeux de mots, scènes parodiques. Comme le parrain local, le terrible Monsieur Big dont les gardes du corps sont des ours blancs carnassiers. Monsieur Big porte la fleur à la boutonnière, fume le Havane, parle avec l’accent trainant de Don Corléone. Il est très impressionnant. Monsieur Big est une... musaraigne !!  La scène est extra. Comme celle où les eux enquêteurs se rendent à la préfecture vérifier des plaques d’immatriculation. Ils sont évidemment très pressés, et découvrent que derrière les guichets, on a embauché des paresseux. Qui agissent et parlent à 1.5 km/h !! La séquence est hilarante, étirée comme il faut, à la seconde près.

Sous ses airs rigolos, rythmé, coloré, le film charrie en réalité des thèmes très actuels, sérieux, qui font échos à l’actualité. Mais pas de sentimentalisme, de clin d’œil appuyés, de romance à deux balles (Nick et Judy ne fautent pas...), de chansons connes (d'ailleurs Judy Hoops fait une réflexion au début à propos de "Delivrée, libérée" l’exaspérante ritournelle de LA REINE DES NEIGES, gros succès Disney), même si Shakira vient pousser la note, ben oui, faut bien vivre... On a affaire à une vraie parabole politique, qui réussit l’exploit d’être fine, drôle, et efficacement réalisée. De ce côté-là, on ne se fait pas de souci, 5 ans de boulot avec les équipes Disney qui ont les moyens de mettre le pognon sur la table, John Lasseter (Pixar) à la production, gage d’exigence. Deux réalisateurs se partagent le travail, Byron Howard (RAIPONCE) et Rich Moore (LES MONDES DE RALPH).  

Sans atteindre les grandes réussites Pixar de la décennie précédente (quoi que...), ce ZOOTOPIE est tout de même une sacrée bonne surprise. Franchement, si les comédies en film "réel" avaient cette même précision du cadre, du timing, du dialogue, on se marrerait plus souvent au cinéma. Pourquoi ? Parce qu'il n'y a pas d'acteur, pas de star sur laquelle on se repose, mais un producteur à la barre, un vrai, qui sans cesse répète à ses équipes : retravaillez cette scène, vous pouvez faire mieux que ça.

Un extrait (repassez-vous le 2 fois, pour apprécier les répliques, l'animation des visages, les expressions de la brebis, c'est hallucinant de précision et de timing), et ensuite, la bande annonce (un peu longuette, et avec Shakira...)

 couleur  -  1h50  -  scope 2:35





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