lundi 28 mars 2016

DES NOUVELLES DE LA PLANETE MARS de Dominik Moll (2016) par Luc B.

Dominik Moll (avec un k, il est d’origine allemande) nous avait épatés avec son premier long métrage, HARRY, UN AMI QUI VOUS VEUT DU BIEN (2000), thriller psychologique, qui reposait sur l’emprise d’un homme maléfique sur un jeune couple, à l’issue sanglante. Ca foutait les jetons. Ce thème, Domonik Moll n’a cessé de le développer ensuite, dans LEMMING (2005) aux lisières du fantastique, et LE MOINE (2011) imbroglio gothico-satanique. Sans  renouveler la réussite de son premier film.
DES NOUVELLES DE LA PLANETE MARS tient du même principe, mais sur le versant comédie. Mars, c’est Philippe, Philippe Mars, divorcé, deux enfants, développeur informatique. Qui rêve de ballade dans l’espace. Le générique nous le montre arrivant des confins de l’univers, puis survolant Paris. Philippe est un homme bon. Une première scène résume bien le personnage (un bon point pour le scénariste…). Philippe demande à un voisin de ramasser la crotte que son clébard vient de lâcher sur le trottoir « où passent des enfants, qui pourraient glisser et se faire mal ». Le mec l’envoie chier : « j’ai mes propres problèmes, les autres je m’en tape ». Philippe lui dit : « si chacun mettait du sien, ça réglerait les problèmes des uns, et des autres, non ? ». Ahuri, l’autre lui demande : « Vous croyez vraiment à ce que vous dites ?! ». Bah, euh… oui… Rire sarcastique du voisin.
Philippe Mars est gentil, serviable, au point de recueillir chez lui Jérôme, un collègue névrotique qui a failli le tuer à coup de hachoir (il lui a juste coupé l’oreille, ce qui vaut à Philippe de se faire surnommer Van Gogh !), échappé de l’hôpital psychiatrique. L’intrus. Celui qui s’immisce dans votre vie, la dérègle, la bouscule, la fait éclater. Jérôme, sangsue gentille comme tout, morbak sous prozac ahuri, mais parfois inquiétant, invite Chloé, elle-même échappée de l’asile, à emménager chez Philippe. Chloé est une activiste végétarienne, phobique, elle ne supporte aucun contact physique et mord les gens…
Philippe Mars essaie de maintenir à flot sa maisonnée, gérer son fils de 12 ans qui vire aussi végétarien (« Gandhi était végétarien, il a réalisé de grandes choses »« Hitler aussi… »), sa fille de 17 ans, thèseuse compulsive pour ne pas finir en looser, tel qu’elle définit son gentil papa.
Il y a plein de personnages loufoques dans ce film, comme le vieux voisin, ancien chauffeur de Giscard, qui roule encore en SM. Jérôme et Chloé, couple improbable, enfermés dans leurs névroses respectives, le chef de Philippe, tout en écoute mais qui vire rapidement parano, les parents décédés de Philippe qui reviennent le voir, profitant d’une faille spatio-temporelle, mais faut faire gaffe à pas se faire piquer en rentrant, normalement les morts n’ont pas le droit ! Y’a aussi l’ex-femme de Philippe, journaliste, qui doit placer à l’antenne le mot « concombre » dans ses commentaires politiques, et la sœur, peintre déjantée, et son chien…
La progression du film est intéressante, le crescendo est lent, les couches d’emmerdes se superposent imperceptiblement. Notamment le fiston, en cinquième, qui échange des textos porno avec Roxane, de sa classe, juste une copine, comme ça, qui le suce aux toilettes et serait bien tentée la prochaine fois par une sodomie ! La scène où Philippe essaie d’expliquer ça au proviseur est hilarante ! Autre bon moment, l’exposé du fils sur un abattoir de poulets, qu’il rédige avec Chloé, osant le parallèle avec le camp de Treblinka, que la père trouve un peu osé...
Evidemment, Philippe explose, veut remettre de l’ordre dans cette chienlit, mais c’est sans compter le projet d’attentat à l’explosif contre un nouvel abattoir à Sedan… Ce film est vraiment bien écrit, il est surtout très bien joué, François Damiens est excellent, et chose rare, les deux gamins aussi. Vincent Maccaigne rappelle le Depardieu d’antan, par sa masse physique et sa sensibilité. Le film emprunte au fantastique poétique, des petites notes délirantes, les dialogues sont drôles, les personnages bien dessinés. Il manque sans doute un rythme plus soutenu (la comédie est affaire de tempo, bon sang, depuis le temps qu’on le dit !) un réel engagement dans la comédie, plus franche, on sent Dominik Moll moins à l’aise dans ce registre, il peint par petites touches, reste un peu sage, ne parvient pas à lâcher les chevaux.
Mais voilà un petit film sans prétention, joliment écrit, qui dénote par son ton, un peu barré, loufoque, attachant, plutôt rafraichissant.

couleur  -  1h40  -  format scope
  



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7 commentaires:

  1. François Damiens est toujours excellent.

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  2. Ma parole Luc, c'est une véritable frénésie de ciné en ce moment !!! Mais tu bosses quand alors ?

    François Damiens toujours excellent dis-tu Shuffle ? Mouais; je veux bien. Sa participation au premier OSS 117 n'était quand même pas a tomber de sa chaise. Et pour l'avoir vu dans cette sinistre farce qu'est "Dieu habite Bruxelles" (ou un truc dans le genre), aux côté de Benoit Pool-machin, et voilà que je me dis avant tout que le gaillard choisi plutôt mal ses rôles. Et puis on commence a le voir un peu trop souvent ces derniers temps. Un peu comme Kad Merad a une certaine époque.

    @+

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  3. Je l'ai vu que dans les bons, alors...

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    1. T'es vache Vincent, F. Damiens dans OSS il avait un troisième rôle ! Il peut faire des films moins bons (la faute à qui, à l'acteur ?), mais lui je le trouve rarement décevant. Il fait partie de ces acteurs complets, à la fois déconnant et tout en retenu, qui font du populaire ("la famille bélier") du plus pointu comme ce "Mars" ou "Tip Top", du drame dans "les Cowboys"... (ses caméras cachées sur la télé belge sont excellentes !)

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  4. Pour OSS 117 c'est vrai. Mais je déplore qu'il s'affiche dans autant de films, dont une pléiade de navets et/ou de daubes (la famille Belier en tête).

    Je n'ai rien contre la personne, mais j'ai le sentiment que Damiens s'illustre trop souvent dans des personnages "forcément" décalés.

    Il n'est pas interdit de me (nous) guider sur une sélection de ses films qui mériteraient selon vous (toi et Shuffle) vraiment le détour.

    Je suis tout ouïe. Hi hi ! :-)

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  5. Ah oui "Cowboys" c'est vrai. Un film sortie dans des conditions pour le moins particulière compte tenu des attentats. Tu nous en parleras sans doute un jour.

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    1. Il y a aussi un aspect à prendre en compte, je crois, pour ces acteurs dits de "second rôles" qui rament pendant 20 ans avant d’accéder aux premiers rôles. Du coup, ils prennent tout ce qu'on leur propose. C'est très concurrentiel ce métier, si tu laisses passer un rôle ou deux, tu risques de te retrouver sur le carreau, ou finir dans une série pour TF1 ! Ils ont attendu longtemps avant d'être reconnus, et dans les métiers artistiques, tu as toujours peur que le public t'oublie. Même des stars comme Deneuve, peuvent sur une période aligner deux ou trois tournages par an, et puis ça se calme, ça revient... Sauf si tu fais du théâtre en plus. Dans ce cas, la télé sert à cachetonner.

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