jeudi 29 juin 2017

Georges BRASSENS - LA MAUVAISE REPUTATION - par Pat Slade




Georges Brassens… Une légende de la chanson, l’une des pièces du trio des poètes avec Brel et Ferré. Une tranche de vie en quelques lignes. Mais à coté de lui… Je m’suis fait tout petit… !





Je suis un voyou





Une guitare, une moustache, une pipe, un polo et de la poésie à profusion. Voilà comment résumer succinctement Georges Brassens. Un visage qui respire la bonhommie et la sympathie, impossible de trouver de la méchanceté dans un tel personnage. Jean-Paul Sartre avait dit de lui : «Il à un beau regard, on voit de la bonté dans ses yeux». 

Qu’est ce qui n’a pas été dit sur Georges Brassens ? Pratiquement tout. Il suffit de se rendre sur la page de Wikipédia pour tout savoir (Ou presque). Il n’est pas évident de trouver des anecdotes ou des pages de l’histoire de sa vie sans reprendre ce que ses biographes ont déjà raconté. Je vais tomber dans les banalités, mais je  vais essayer de parler du moustachu le plus sympa de la chanson française vu par mes yeux. Il est possible que j’omette des choses ou que j’en oublie volontairement ou pas. Quand on veut parler d’un monument tel que lui c’est comme si on essayait de grimper l’Everest avec pour seul instrument une fourchette à escargot. Mais on connait surtout le Georges Brassens chanteur et poète, mais pas trop sa jeunesse, hormis pour les aficionados de l’homme à la moustache.

Il est né en 1921 à Cette (La ville prendra l’orthographe de Sète en 1927) d’une mère catholique et dévote, d’origine napolitaine et veuve de guerre et d’un père entrepreneur et maçon qui lui est un libre penseur et un anticlérical notoire. Un père tolérant et généreux puisque il acceptera que son fils soit baptisé (Mais il n’assistera pas à sa première communion) puis qu’il fréquente un établissement scolaire religieux. Dans la maison Sétoise, la musique ne manque pas de raisonner et, de par ses origines, sa mère joue des mélodies napolitaine à la mandoline qui amèneront Georges à en apprendre les rudiments techniques qu’il développera plus tard à la guitare. En classe, il est un élève moyen, aucune matière ne l’intéresse, à part le français. Il est la plupart du temps dans la rue plutôt que sur les bancs de l’école avec ses copains (Parmi lesquelles se trouve Roger Thérond  l’ancien patron de Paris-Match maintenant tenu par Olivier Royan, un imb**il avec qui j’ai été en classe ! Désolé ! Je ne pouvais pas garder ça pour moi !) Des potes qui l’appellent tous «Jo», orthographié par Brassens «Géo».

Il se passionne très tôt pour la poésie et cela grâce a son professeur de français et ami de Jean-Paul Sartre : Alphonse Bonnafé. Il ouvrira à ses élèves de troisième les portes de la poésie de Rimbaud à Paul Valéry et de Mallarmé à Charles Baudelaire. Bonnafé sera plus tard en 1963 le premier biographe Du chanteur. Georges Brassens commence à écrire quelques textes de chansons qu’il adapte à des airs du moment. Il ira jusqu’à créer un petit orchestre nommé  «jazz» où il y tiendra… la batterie !

Il abandonne définitivement ses études en 1939. Entrainé par une bande de petit voleurs, il se retrouve impliqué dans une affaire de vol de bijoux, plus pour la frime auprès des filles que pour l’intérêt pécunier (Les temps ont bien changé !). Arrêté au mois de juin, le juge de Montpellier, bon prince, réclamera de la prison avec sursis. Il écopera donc de quelques mois avec sursis ! Son père vraiment très libéral, passera rapidement l’éponge sur cette erreur de jeunesse. Mais l’effet «Boule ne neige» aura des répercutions sur son avenir, l’exclusion du collège, les qualificatifs auquel il sera affublé comme «Racaille», «Petite pègre étudiante» ou encore «Bourgeois désœuvré». La blessure la plus importante dans cette histoire, sera la peine infligée à sa mère. 

Il songe à quitter Sète pour Paris. En attendant il travaille avec son père. En février 1940, il prend le train pour la capitale quatre mois avant l’arrivée des allemands. Durant les premiers mois, il vivra chez sa tante rue d’Alésia dans le XIVème arrondissement. Il assure quelques petits boulots et se retrouve ouvrier chez Renault.

Il découvre Ray Ventura et Charles Trenet et écrit des poèmes qu’il publiera en deux recueils à compte d’auteur en 1942 «A la Venvole» et «Des coups d’épée dans l’eau». En 1943, il reçoit un ordre de réquisition et un bon de transport pour l’Allemagne, quand on a 22 ans en temps de guerre, la seule chose qui peut vous arriver, c’est le S.T.O (Service du Travail Obligatoire). Il prend le train à la gare de l’Est pour Basdorf comme beaucoup de ses compatriotes. Il travaillera dans un atelier des usines BMW, Il aura comme pote de chambré Pierre Onteniente qui deviendra plus tard son secrétaire et homme de confiance. Le chanteur le surnommera «Gibraltar». Brassens
Jeanne et Marcel
aimait donner des surnoms à ses proches. Ses camarades de chambrée acceptent qu’il laisse la lumière la nuit pour lui permettre d’écrire, en contrepartie, il fait la corvée de café du matin. Il reviendra en France en
1944 pour une permission sans retour. Il se cachera chez un couple qui occupera une place de choix dans sa vie, Jeanne le Bonniec et Marcel Planche pour qui il consacrera deux chansons «La Cane de Jeanne» et «Chanson pour l’Auvergnat» pour Marcel. Il restera chez eux jusqu’en 1966.


Avec Püppchen
Après la guerre, pour gagner sa vie, il écrit des articles pour la revue anarchiste «Le Libertaire». Même s'il est sensible à ce genre d’idée, il n’exprimera jamais ses idées au grand jour à la différence de Léo Ferré. En 1945, il achète sa première guitare et peaufine sa technique sur les premiers titres de son répertoire. Ses chansons seront son combat contre l’hypocrisie de la société. En 1947, il sort son premier roman «La Lune Ecoute aux Portes» et commence à écrire ses premières chansons. « Brave Margot», «La Mauvaise Réputation» et «Le Gorille» seront ses balbutiements dans le domaine. «Le Gorille» sera interdit d’antenne pendant des années, Brassens  y évoquait son désaccord avec le principe de la peine de mort. Ce sera aussi à la même époque qu’il rencontre la femme de sa vie : Joha Heiman d’origine estonienne que Brassens surnommera Püppchen. Le couple ne partagera jamais le même toit.     




Les Copains d’abord 






Avec Patachou
En 1950, il croise la route du chansonnier Jacques Grello (Qui, d’après Brassens, serait celui qui lui aurait offert sa première guitare) qui va le faire engager dans plusieurs cabaret parisien comme le Lapin Agile à Montmartre, au Milord l’Arsouille dans le 1er arrondissement de Paris où la crème de la chanson française a fait ses premiers pas ou à la Villa d’Este non loin de la place de l’Étoile. Mais le succès ne sera pas au rendez-vous. Il faudra attendre encore deux ans avant qu’il ne rencontre la chanteuse Patachou qui est à la tête d’un cabaret salon de thé ouvert avec son mari à Montmartre et simplement appelé «Chez Patachou», après qu’elle ait essayée de chanter elle-même dans son propre établissement (Les journalistes parisiens la rebaptiseront du nom de son cabaret), elle est convaincue du potentiel de Brassens. Elle l’engage ainsi que Pierre Nicolas qui deviendra son contrebassiste attitré. Patachou accepte de chanter certain de ses titres (Elle enregistrera la même année un album 8 titres). Elle le pousse à chanter lui-même ses titres, mais il se voit plutôt comme un simple auteur-compositeur qu’un interprète, sa timidité le pousse à ne jamais se mettre en avant.

Les premiers concerts seront  un succès critique et public. Jacques Canetti le patron de chez Polydor l’engage dans cabaret «Les Trois Baudet». Pour se préparer au public parisien, il fait des tournées d’été. Il fait la première partie d’Henri Salvador  et un premier scandale avec «Le Gorille». Jacques Canetti lui fait enregistrer ses premiers disques. En octobre 1953, Georges Brassens fera son premier Bobino (Il y passera 13 fois) et puis l’Olympia. Trois ans plus tard il s’essaye au cinéma dans un film de René Clair «Porte des Lilas» tiré d’une adaptation du livre «La grande ceinture» de son pote René Fallet. En 1964, il va écrire l’emblématique «Les Copains d’abord» pour le film «Les Copains» d’Yves Robert qui fait aussi partis du cercle de ses intimes. En 1970 ce sera la chanson «Heureux qui comme Ulysse» un film de son copain Sétois Henri Colpi avec Fernandel et puis la musique du film de Michel Audiard «Le Drapeau Noir Flotte sur la Marmite».

Les reconnaissances pleuvent : grand prix du disque Charles Cros en 1954,  grand prix de la poésie de l’Académie Française en 1967, grand prix de la ville de Paris en 1975, Prix du disque en 1976 pour ne citer que cela, sans oublier les monnaies qui ont été frappées à son effigie. Mais l’imperturbable Brassens n’est pas en fer, depuis quarante ans il souffre de coliques néphrétiques qui l’empêche de poursuivre le rythme effréné des tournées. Il enregistrera deux derniers albums en 1976 «Trompe la mort» et en 1980 «Georges Brassens chante les chansons de sa jeunesse» ou il reprend Jean Nohain, Charles Trenet aux profits du Comité Perce-Neige de Lino Ventura.

Le 29 octobre 1981, le journal Libération va titrer «Brassens casse sa pipe». Un méchant cancer de l’intestin aura raison de celui qui chantait «Les funérailles d’antan». Il ne sera pas enterrer sur la plage de Sète comme il l’avait chanté, ni dans le cimetière marin où est Paul Valery qu’il avait su si bien interprété. Brassens l’anticlérical, l’antimilitariste qui lira Proudhon, Bakounine et Kropotkine qui s’impliquera dans la fédération anarchiste qui ne se définit pas comme un poète : «Je ne pense pas être un poète… Un poète, ça vole quand même un peu plus haut que moi… Je ne suis pas poète. J’aurais aimé l’être comme Verlaine ou Tristan Corbière» sera quand même reconnu dans son pays où des lieux divers comme des parcs et des salles des fêtes porteront son nom. Des thèses lui seront consacrées, il est traduit et chanté dans le monde entier et bon nombre de chanteurs hexagonaux vont reprendre ses titres comme Maxime le Forestier qui sera un des premiers à faire un album avant la mort de celui-ci en 1979, 6 autres disques suivront par la suite.

Le moustachu débonnaire est rentré au Panthéon de la musique et jamais personne ne pourra l’en déloger. Pour sa discographie, pas de choix à faire, c’est tout ou rien !!   



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