mercredi 12 juillet 2017

Thorbjorn RISAGER & The Black Tornado "Change My Game" (2017), by Bruno


     Qui aurait parié sur lui ? Sur sa longévité ? Ce danois qui a décidé au début du siècle de se vouer au Blues, soutenu par un groupe étoffé qu'il fonde en 2003. Un orchestre qui allait lui permettre de s'aventurer tant dans le Blues de Chicago que celui de New Orleans. Un orchestre cuivré mais non clinquant ou tapageur ; en dépit du nombre, et notamment des trois souffleurs présents, ça ne tombe jamais dans la surabondance et l'excès, ou encore dans les longues plages d'improvisations. Quatre gaillards
 Un groupe qui, ô miracle, est resté inchangé depuis, à l'exception du renfort d'un saxophone ténor en 2014. Les membres sont sélectionnés avec soin, autant pour leurs qualités de musicien qu'humaine. Ce qui permet ainsi d'avoir un groupe soudé - et non une troupe de mercenaires peu impliqués - et cela s'entend.

     Le collectif a réalisé un premier disque en 2004 (un live), et depuis, il paraît poursuivre nonchalamment son chemin. Ne prenant la peine de sortir un disque que quand bon lui semble. Entre chaque nouvelle galette, il y a un temps de gestation de deux à trois ans. Le précédent, "Too Many Roads", date de 2014. Thorbjorn Risager mise sur la qualité plutôt que la quantité. Ce que confirme le dernier : c'est toujours savoureux de bout en bout.

     Alors certes, on pourrait faire la fine bouche en reprochant à ce dernier né de n'être pas aussi accrocheur, ni même aussi percutant que "Dust and Scratches" (son meilleur ?), voire de "Track Record". La première écoute pourrait, éventuellement, s'avérer décevante, en laissant cette fausse impression de manque de cohésion, de disque fourre-tout où Risager et sa troupe s'essayent à de nouveaux climats. C'est en partie vraie. Néanmoins, il y a toujours cette voix singulière servant de liant aussi solide que du béton armé, capable de consolider les édifices les plus fragiles. 

     La preuve ? Lorsque débute le titre éponyme, on se demande s'il s'agit d'un pastiche ou bien si le collectif n'a pas retourné sa veste (une pratique plus que jamais d'actualité qui n'est plus réprimandée, qui n'indigne plus. Qui semblerait même être encouragée). En effet, "Change my Game" est un Funk qui s'appuie sur un rythme disco pachydermique typé fin 70's. On s'inquiète grave. Hors, dès lors que Risager pose sa voix, il rallie tous les bords à sa cause. Cette voix à la fois sourde et virile, ce souffle chaud, subtil mixture de Neal Black, Bob Seger, Delbert McClinton, Garou, qui semble parfois être en mode "forfait voyelles" (en avalant les consonnes), mais qui a la capacité rare de crédibiliser, de muter n'importe quelle modeste chanson en un pure instant de Blues et/ou de Rock'n'roll.
Toujours sans cette voix profonde qui élève un "I Need to Love You" qui, sans elle, n'aurait été qu'un soft-blues pour âme en peine. Et encore, pour finir, un dernier sauvetage avec "Hard Times" qui fait dans le Country-rock mainstream avec chœurs féminins et pedal-steel.

     Mais pas d'inquiétude, ces Danois n'ont pas vendu leur âme au diable (ou autres démons). C'est dans l'ensemble toujours bien charnu et organique, toujours enveloppé d'un chaud manteau de Rock. 
"Hold My Lover Tight", comme un esprit vengeur, dans un fracas Hard-boogie-blues, déboule pour rétablir l'ordre et l'harmonie. (ça sent à plein nez "Going Down"). Comme "Dreamland" qui fleure bon le British-Hard-blues 70's ; "Maybe It's Alright" qui sonne comme du Stones moderne ; "Train" blues-boogie roots et nerveux ou encore "City of Love" qui débute sur un boogie gras à la ZZ-Top avant de rapidement ralentir le tempo, mais en gardant le même degré de fuzz .
  Ainsi, dépassé les a priori, le stade inévitable du comparatif, on se laisse facilement et insidieusement séduire. Pour finalement arriver à l'évidente conclusion qu'une fois encore, Thorbjorn RISAGER & The Black Tornado ont conçu un très bon disque, intemporel, qui a trouvé le juste milieu entre modernité et une certaine tradition, à la fois cuivré et foncièrement électrique. Et qui devrait logiquement s’inscrire parmi les meilleurs de l'année.

   Thorbjorn RISAGER & The Black Tornado c'est l'assurance d'un bon disque, sans faille perceptible, d'une tenu inébranlable, et inoxydable. De l'excellent travail. Ce septuor a encore de la ressource.

01. I Used To Love You (3:51)
02. Dreamland (5:51)
03. Change My Game (5:00)
04. Holler ‘n Moan (4:44)
05. Hard Time (4:10)
06. Long Gone (5:16)
07. Hold My Lover Tight (4:07)
08. Maybe It’s Alright (4:28)
09. Train (3:46)
10. Lay My Burden Down (5:25)
11. City Of Love (4:58)



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Autres articles sur le Danois et sa clique (... clic-lien) :
"Too Many Roads" (2014)

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